10 ANS /// LA FIN

Octobre 2008, je me lance, première salve de conseils discographiques, quelques lignes, des liens Myspace (qui depuis est passé dans la catégorie "vintage"), premier partage sur le world wide web, un peu confidentiel, les amis s'en souviennent, peut-être.

Octobre 2018, dix ans donc, l'épicerie fine pour oreilles exigeantes a vu passer sur ses étals pas loin de mille disques (et même une poignée de bouquins, d'expos, de films...), et a proposé quelques soirées mémorables (apérovisions, concerts, projections de films, dj-sets...). La newsletter est très rapidement devenu un blog, puis un site, et à nouveau un blog. Dix ans de Myringa, de belles choses, du bon temps. Dix ans, anniversaire impensable lors de ce premier partage innocent de 2008.
Octobre 2018, Myringa s'arrête, j'arrête, satisfait de cette expérience, heureux de ce parcours, ravi des retours de ceux qui s'y sont intéressé. Myringa s'arrête, du moins sous sa forme actuelle, digitale, car une édition papier du Myringazine continuera certainement à paraître de temps en temps, quelque part dans le monde réel.
Et dans le monde réel je ne peux pas vraiment arrêter, épicier pour oreilles exigeantes de profession, je continuerai à conseiller les disques que j'aime. Ceux qui me connaissent sauront où me trouver, ceux qui traînent dans le coin de Saint-Etienne finiront peut-être par me croiser, pour les autres il y a éventuellement les réseaux sociaux pour m'attraper.
À bientôt, dans la vraie vie, ou ailleurs.
/// Harold Madiou ///

septembre


CEDRIC BURNSIDE -"Benton County Relic"

Dans la grande tradition du blues rural du Mississippi, brut de décoffrage, sans fioritures, mais à fleur de peau. Voici Cedric Burnside. Chanteur, songwriter, guitariste, batteur, élevé par son grand-père RL Burnside. Tombé dans la marmite tout petit, il a ensuite côtoyé Jon Spencer, T-Model Ford, ou Black Joe Lewis, entre-autres. Un héritage qui transpire à grosses gouttes sur cet album. Blues du delta donc, crade, envoûtant, abrasif, et électrifié. 
(disponible en cd et vinyle chez Single Lock Records / Modulor)

SAN CAROL -"Houdini"

Vapeurs romantiques, tension subtile et entêtante, groove d'obédience shoegaze, pop relax et confortable, on se croirait dans un disque de Junip, avec un petit quelque chose de Zero 7 ou Air. Mais cette belle échappée s'intitule "Houdini" et nous est offerte par Maxime Dobosz aka San Carol. Guitares, claviers, choeurs, batterie, voix, basse, tout est délicat, jamais niais, doux mais avec de la poigne. San Carol aime le rose et en impose.
(disponible en cd, vinyle et cassette chez Freemount Records / Differ-Ant)

PÉROKÉ -"Voodoo You Think You Are !?"

Gros bec crochu et plumage chamarré, ou bien pastis et sirop de menthe, pour certains cela évoquera plutôt un portemanteau vintage... mais désormais il faudra aussi penser à un combo machines, claviers et costards chatoyants, d'acc papa? Voici donc Péroké, duo tourangeau supersonique avec un "é", comme dans électro, afro-éthio-groove, et excité. Cinq titres pour une grosse nouba dans laquelle les sonorités migrent et se métissent en toute liberté. Dégage Eric Zemmour, ce n'est pas pour toi.
(disponible en vinyle chez Les Lendemains d'Hier / L'Autre Distribution)

DHAFER YOUSSEF -"Sounds Of Mirrors"

Chanteur et oudiste virtuose, le Tunisien fusionne une fois de plus les vibrations de notre bonne vieille Planète Bleue. Clarinette turque, guitare norvégienne, tablas indiens, arabesques de jazz et sensibilité humaine. Tel un tapis de yoga volant, ce disque vous transportera avec bienveillance vers une destination inconnue et pourtant agréablement familière.
(disponible chez Anteprima / Universal Music)

FRED PALLEM & LE SACRE DU TYMPAN -"L'Odyssée"

Du Fred Pallem, dans une pochette décorée par Elzo Durt, bien entendu on se jette dessus. Pas déçu, bien entendu. Et peut-être bien le meilleur album du capitaine-compositeur-arrangeur-bassiste. Accompagné de son excitant big-band supersonique, il se lance une fois de plus à l'aventure. Orchestrations flamboyantes de classe supérieure, groove terrifico-nostalgique, jazz-funk impitoyable et rétro-pop, feront défiler dans votre inconscient les images stéréoscopiques de cette "Odyssée".
(disponible en cd et vinyle chez Train Fantôme / L'Autre Distribution)

EVERLAST -"Whitey Ford's House of Pain"


Everlast, Whitey Ford, ou bien Erik Schrody (son vrai nom), vous l'avez forcément déjà entendu. Dans les années quatre-vingt-dix, proche du rapper Ice-T, il fonde House Of Pain, eh oui "Jump Around". Plus tard il fera aussi partie de La Coka Nostra, terrible groupe de hip-hop hardcore. Mais quand il sort des albums en solo, son phrasé rap fusionne avec un blues acoustique et brut de décoffrage, ses spoken-words profonds s'accompagnent d'un folk-rock tendu. En gros, une version groovy de Johnny Cash.
(disponible en cd et vinyle chez Long Branch Records / Modulor)

BROADWAY LAFAYETTE -"Subway Zydeco"

Vous avez peut-être reconnu deux ou trois trognes sur la pochette de ce disque, non? Oui, en haut il s'agit bien de Mick Collins, le chanteur des Dirtbombs. Les connaisseurs auront peut-être aussi repéré le compère de Jon Spencer, Matt Verta-Ray (et sa femme, mais ça c'était compliqué à trouver). Et les membres de Mama Rosin, cet excellent groupe de garage-blues cajun dont je vous ai déjà parlé. Cette dream team est aux commandes d'une rame de métro un peu sauvage qui relie Detroit, New York City, Genève, et la Louisiane. Ne craignez pas les moustiques, ni les alligators, et plongez dans le bayou de Broadway Lafayette.
(disponible en cd et vinyle chez Hound Gawd! Records / InOuïe Distribution)

HENRY CHARTIER -"Nino Ferrer, Un Homme Libre"

Il nous a quitté il y a vingt ans, en se tirant une balle dans le coeur. Nino Ferrer, grand manitou du rhythm'n'blues à la française, il a marqué les esprits avec des chansons qui traversent les décennies et se transmettent de générations en générations: "Mirza", "Le Téléfon", "Oh! Hé! Hein! Bon". Mais depuis les années soixante, entre deux succès populaires imparables, il était capable de composer de fantastiques morceaux bourrés de soul, parfois un peu psyché, ou flirtant avec le rock progressif. Des morceaux finalement peu connus, bizarrement une grande partie de son oeuvre a été mise de côté, et ignorée du grand public. Il en a souffert, il en est même peut-être mort.
Ce nouveau titre de la collection "Musiques" de l'excellent éditeur Le Mot Et Le Reste lui est consacré, une bonne occasion d'en apprendre un peu plus sur ce musicien-auteur-compositeur majeur et injustement sous-estimé.
(disponible aux éditions Le Mot Et Le Reste)

A noter également, la sortie de "... Et Toujours En Eté", un nouveau best of, sous la forme d'un coffret triple-cd, incluant quelques morceaux rares et de bonnes reprises par des artistes internationaux.
(disponible chez Barclay / Universal Music France)

OH SEES -"Smote Reverser"

Un jour on dira peut-être "bon ça suffit, les Oh Sees ils feraient mieux d'arrêter de sortir des disques toutes les cinq minutes quand même, blah blah blah", mais pas aujourd'hui.
Effectivement "Smote Reverser" frappe fort, une fois de plus. Certainement grâce à ce petit goût de prog, ces longs jams rock, quelques orgues au groove pyromane, et ces séquences heavy qui basculent sur des instants de finesse apaisants. Et aussi cette majestueuse pochette qui affolera le metalleux qui sommeille en toi.
(disponible en vinyle et cd chez Castle Face Records / Differ-Ant)

AL DOUM AND THE FARYDS -"Spririt Rejoin"

Une jolie pochette, sur laquelle il se passe des choses un peu étranges. Un label auquel on fait aveuglément confiance, Les Disques Bongo Joe.
Alors on écoute ce quatrième album d'un obscur groupe italien au nom délicieusement exotique, Al Doum And The Faryds. Et on embarque pour un voyage cosmique, une promenade dans une jungle du Crétacé, en fumant un narguilé goût mafé-poulet ... Oui, c'est un peu psychédélique, ça groove sérieusement, c'est exquisément enivrant.
(disponible en vinyle et cd chez Les Disques Bongo Joe / L'Autre Distribution)


DELGRES -"Mo Jodi"

Guitare Dobro, batterie, et sousaphone, un power trio plutôt inhabituel. Chant créole vindicatif et blues-rock abrasif, avec un nom de groupe inspiré du héros de la lutte contre l'esclavage en Guadeloupe. Une secousse sismique qui rapproche la Louisiane des Antilles. Voici Delgres, un deux-titres est déjà sorti récemment, et l'album (terrible album) arrive fin août. Bonnes vacances!
(disponible le 31 août en cd et vinyle chez Groupe Yapuka / Pias)
(single déjà disponible en vinyle)